La Direction générale des Finances Publiques vient de communiquer les chiffres portant sur les remboursements et les impositions supplémentaires liés à la déclaration des revenus 2022. Si à ce stade les chiffres sont encore provisoires, ils ne devraient évoluer qu’à la marge.
A ce stade, près de 9,6 millions de contribuables seraient concernés par un versement complémentaire pour un montant approchant les 22 milliards d’euros…
À l’opposé, près de 15 millions d'usagers devraient bénéficier d’une restitution pour un montant dépassant vraisemblablement 13 milliards d’euros.
Pour rappel l’impôt sur le revenu représentait pour l'État en 2022 un montant de recettes de l’ordre de 110 milliards d’euros pour près de 40 millions de foyers fiscaux, dont 18 millions imposables.
La mise en place du Prélèvement à la Source (PAS) devait justement éviter ces ajustements et ces décalages dans le temps, or il s'avère donc que 20% de l’impôt sur le revenu en année N n'est pas ou est mal soumis à ce mode de recouvrement.
Cet état de fait est loin d’être anecdotique puisqu'il concernerait donc près de 70 % des foyers imposables… il se vérifie d'une année sur l'autre, voire même progresse : moins de foyers doivent s'acquitter d'un versement complémentaire par rapport à 2022, mais globalement pour un montant plus important et plus de foyers fiscaux vont bénéficier d'une restitution.
Solidaires Finances Publiques avait déjà mis en exergue cette ambigüité dans un dossier en janvier 2022.
En effet, de très nombreux contribuables ne pensent pas à modifier leur taux de prélèvement (rappelons également que les 8 premiers mois de 2023 ont été prélevés avec le taux de 2021, dernier taux établi avec l'avis d'imposition des revenus de 2021), du fait qu’ils ne déclarent pas, par exemple, un changement de situation familiale (deux naissances sur trois ne sont pas déclarées dans les temps), ou au contraire qu' ils ne pensent pas à tenir compte d’une évolution à la hausse de leurs revenus.
Cette réalité démontre que le système du PAS n’est aujourd’hui toujours pas compris et assimilé par nos concitoyens, les différents chiffres avancés ainsi que les échanges des agents de la DGFiP avec les contribuables nous le confirment.
Afin que le montant prélevé de l’impôt sur le revenu tienne effectivement compte des évolutions des situations familiales ou financières, les contribuables doivent faire preuve d’une très grande réactivité, elle est nécessaire et intrinsèque au bon fonctionnement du système. Or aujourd’hui, cette réactivité n'est toujours pas comprise et assimilée par nos concitoyens comme le montre à la fois les chiffres et les échanges avec les contribuables.
La communication initiale du gouvernement en 2019 prônait fièrement qu’avec la mise en place du prélèvement à la source, l’impôt s’adapterait plus facilement et plus rapidement à la situation des contribuables…
Si la mise en place du prélèvement à la source s’est globalement bien passée, on ne peut donc que rester perplexe sur les principaux buts affichés à l’époque, comme améliorer la contemporanéité et le taux de recouvrement…
Nous pouvons rappeler que pour la période antérieure à la mise en place du prélèvement à la source, le taux de recouvrement était déjà très bon. Ainsi en 2018, on atteignait 98,5 %... Certes, ce taux a très légèrement progressé pour atteindre 99,4 % en 2021. Alors tout ça pour ça pourrait-on dire ?
Certes, le système est plus indolore pour le contribuable, il n’a plus vraiment toujours conscience de payer l’impôt sur le revenu et majoritairement fait preuve d’une passivité certaine, voire malheureusement d’un laxisme souvent marqué. Si politiquement, le fait de perdre cette conscience de l’acte de l’impôt peut être vu comme positif (moins nos concitoyens ont le sentiment de payer un impôt, mieux nos gouvernants se portent...) pour Solidaires Finances Publiques justement ce point pose un problème.
Nous avons toujours porté le rôle central de l’impôt avec la notion du vivre ensemble. Et aujourd’hui, avec la mise en place du prélèvement à la source on peut constater des effets délétères en matière de consentement à l’impôt par exemple et/ou d'appréhension des services publics.
Ainsi, sans refaire l’histoire, Solidaires Finances Publiques avait porté l’existence de solution alternative. Il aurait été en effet tout à fait possible d’imaginer un système d’acomptes (modulables en fonction des changements de situation) directement versés par le contribuable à l’administration fiscale sur le modèle de la mensualisation, mais calculés sur les revenus de l’année en cours.
Un tel système n’aurait certes pas gommé la complexité inhérente à la structure de l’impôt sur le revenu (gestion des changements de situation, réactivité nécessaire du contribuable), mais il aurait eu le mérite de ne pas multiplier les parties prenantes et aurait permis de garder une vraie conscience de participer à la vie collective. En effet, le contribuable n’aurait conservé qu'un seul et unique interlocuteur, la DGFiP, comme dans le système précédent.
En outre, cette organisation aurait permis de respecter le principe d’égalité devant l’impôt, puisqu’il pouvait s’appliquer à tous les contribuables et pas seulement aux salariés et aux retraités comme avec le Prélèvement à la source, où un tiers intervient même si les autres sources de revenus comme les revenus fonciers sont soumis à des versements envers le trésor public.
Un autre choix a été fait. Avec le risque, les années passant de voir de plus en plus les limites du système mis en place en 2019.
Solidaires Finances Publiques porte une nouvelle fois la demande d'une réelle analyse financière, mais également sociologique et organisationnelle sur ce sujet.